Les centres d’intérêt de Pierre Bécat, loin de se limiter à l’histoire et à la littérature, étaient très variés. Comme beaucoup d’avocats et d’hommes politiques de sa génération, il était passionné par les sciences occultes et les sociétés secrètes. Il entretint notamment des relations suivies avec plusieurs voyantes très en vue, ainsi qu’avec des cercles anthroposophes, théosophes, ésotériques…
Nous présentons ici deux lettres inédites tirées de la correspondance reçue par Pierre Bécat.
Lettre de Madame Fraya à Pierre Bécat (vers 1930)
Valentine Dencausse, dite Madame Fraya (Villeneuve-de-Marsan, 21 mai 1871-Paris, 16 février 1954) est une célèbre voyante française. Protégée du célèbre occultiste Papus, elle se rendit fameuse pour avoir prédit le déclenchement de la Première guerre mondiale ainsi que plusieurs batailles où les Français furent victorieux. En 1914, elle prédit au prince Youssoupov qu’il allait assassiner Raspoutine. Elle a lu dans les mains de toutes les célébrités de la Belle époque : Sarah Bernhardt, Colette, Pierre Loti, Anna de Noailles, Sacha Guitry, Maurice Barrès, Jean Jaurès, Georges Clemenceau. Elle prédit une réussite éclatante à Marcel Proust. Elle tomba cependant en disgrâce après n’avoir pas su annoncer la Seconde guerre mondiale.
Lettre de Gabrielle de Jarny à Pierre Bécat (8 juillet 1940)
Jeune personne dont on ignore la date de naissance et de décès, Gabrielle de Jarny était introduite, dans les années 1930, dans les milieux occultistes français. Dans cette lettre, elle évoque la création du groupe « Les Amis dans la Cité », cercle théosophe créé par Albert Legrand (1887-1950), et qui comptait parmi ses membres les occultistes Sédir et Émile Catzeflis. Elle invite Pierre Bécat à y participer malgré le contexte peu propice de la défaite de la France.
Après guerre, Gabrielle de Jarny publia de nombreux ouvrages : Le Christianisme vu par les côtés cachés à l’histoire (1951), Initiation au mysticisme chrétien, résumé des connaissances préparatoires au mysticisme chrétien (1958), En esprit et en vérité (1959), Nourritures spirituelles (1961)…
Alors en surfant sur le web (Gallica avec les mots clés Mme Fraya et voyante) je suis tombé sur un article de 1925 ou Mme Fraya prévoyait une période de répit de 15 ans.
Donc 1925 plus 15 ans = 1940.
Rebelote, comme avant la première guerre mondiale elle voyait des signes annoncant assurément la guerre dans les mains des enfants. On ne peut donc pas dire qu’elle n’avait rien vu.
Au début de 1940 on l’interrogeait sur la guerre. On peut dire que les carottes étaient déjà cuites. Elle a tenu des propos relativement optimistes par rapport à cette période horrible pour la France.
Effectivement, avec la politique de collaboration les usines françaises fonctionnaient au profit de l’Allemagne mais la vie continuait malgré tout… avec beaucoup de difficultés.
Pour Arletty, pointée du doigt pour une attitude ambigue pendant la guerre qui lui a coûté sa carrière, Mme Fraya n’avait rien vu des ennuis qui allaient lui tomber dessus à la libération. Elle ne lui a annoncé que des banalités (d’après Arletty).
On peut cependant dire que Mme Fraya n’a rien vu venir en ce qui concerne la mauvaise gestion de sa succession. Ayant fait une donation à un organisme public, son hôtel particulier a été la victime de vandales et ses biens ont été volés. Simone de Tervagne (biographe de Mme Fraya) a pu récupérer in extremis quelques lettres et quelques objets de Mme Fraya.
Tout cela est clairement expliqué en détail dans le livre de Simone de Tervagne : » L’au-delà mène l’enquête ».